Besançon le 10 novembre
Monsieur le président de la République,
Chaque jour, au nom d’une politique qui vise à dissuader les personnes exilées de transiter par Calais, notre pays franchit des lignes rouges. Chaque jour, il se met dans l’illégalité et renie ses valeurs en traitant ces personnes de façon inhumaine et dégradante. Il a fallu que trois citoyens s’engagent dans une grève de la faim pour briser le silence assourdissant dans lequel ce drame se poursuit sur notre sol.
Depuis maintenant 31 jours, Anaïs Vogel et Ludovic Holbein ont cessé de s’alimenter pour demander le respect de la dignité et des droits des personnes exilées à Calais. Ils poursuivent leur démarche, avec le soutien entier de Philippe Demeestère qui a fait le choix de continuer le même combat par d’autres actions.
Comme nous l’avons affirmé dans un communiqué le 26 octobre, rejoints par 180 organisations de la société civile française, nous soutenons pleinement les trois revendications qui justifient l’action radicale et courageuse entreprise par Anaïs Vogel et Ludovic Holbein : la fin des expulsions quotidiennes sur Calais, la fin de la destruction des effets personnels des personnes exilées pendant la trêve hivernale, l’ouverture d’un dialogue raisonné et constructif entre les pouvoirs publics et les associations non mandatées par l’État sur la distribution de biens de première nécessité.
Ces revendications très élémentaires n’ont pas encore été prises en compte. Mandaté par le ministère de l’Intérieur, M. Didier Leschi a essentiellement annoncé deux mesures : un préavis de 45 minutes avant les expulsions, la création d’un « sas » pour 300 personnes avec une orientation vers des hébergements loin de la frontière britannique.
Ces annonces ne sont pas à la hauteur : elles ne remettent aucunement en cause les traitements inhumains et dégradants infligés quotidiennement aux plus de mille personnes exilées vivant dans le Calaisis.
Nos associations restent très mobilisées en soutien à cette action qui rappelle la responsabilité première du gouvernement français. Comme nous l’observons depuis près de 30 ans, le choix prioritaire de la dissuasion, y compris par la force, n’a jamais eu pour autre effet que d’exacerber la souffrance humaine, aggraver les atteintes aux droits humains et accentuer l’épuisement des défenseurs des droits humains, citoyens et citoyennes fidèles au principe républicain de fraternité. Pas plus que vous, nous ne souhaitons qu’Anaïs Vogel et Ludovic Holbein ne mettent leur vie en danger.
Dès lors, nous en appelons à votre sens des responsabilités et à votre humanité. La situation qui prévaut à Calais, à Grande-Synthe et plus généralement sur le littoral de la Manche et de la mer du Nord, impose qu’une réponse gouvernementale positive soit apportée au plus vite aux demandes minimales formulées.
Nous attendons de votre part un geste fort, en vous engageant directement sur ce dossier, afin que de nouvelles discussions commencent rapidement. Nos organisations sont prêtes à entrer immédiatement en dialogue avec vous.
Nos organisations sont convaincues que des solutions peuvent être apportées à cette situation. Elles doivent s’ancrer résolument dans le respect effectif des droits humains des personnes exilées et impliquent un engagement politique sur un temps long et l’ouverture d’un dialogue raisonné associant personnes exilées, associations et pouvoirs publics.
Nous vous appelons à agir dans les plus brefs délais.
Veuillez agréer, Monsieur le président de la République, l’expression de notre très haute considération
Pour Peuples solidaires Doubs
Lucile Garbagnati
Vice présidente